SPECTROSCOPIE - Spectroscopie des rayons X

SPECTROSCOPIE - Spectroscopie des rayons X
SPECTROSCOPIE - Spectroscopie des rayons X

Les principes fondamentaux qui régissent les transitions électroniques du domaine X et qui permettent leur interprétation sont identiques à ceux de la spectroscopie optique. Toutefois, les transitions X présentent des particularités liées au fait qu’elles mettent en jeu une ou deux sous-couches complètes de l’atome: ainsi, en émission, les transitions X les plus intenses ont lieu entre deux sous-couches normalement complètes dans l’atome neutre; leurs caractéristiques dépendent donc des caractéristiques de ces sous-couches. En absorption, les transitions X prennent place entre une sous-couche complète et un niveau vide; elles dépendent à la fois de la distribution électronique externe et de la sous-couche interne. Il en est de même pour les transitions d’émission entre une sous-couche de valence et une sous-couche normalement complète.

Dès 1913, les spectres d’émissions X ont contribué à notre connaissance de la structure électronique des atomes grâce aux travaux de H. G.-J. Moseley. Celui-ci montra que la racine carrée de la fréquence des raies X les plus intenses augmente linéairement avec le numéro atomique Z de l’émetteur (cf. rayons X). Les graphes qu’il obtint en portant ‘ en fonction de Z lui permirent à la fois de corriger des anomalies qui apparaissaient dans la classification de Mendeleïev, fondée sur les poids atomiques, et de prévoir l’existence d’éléments encore inconnus: technétium (Tc), prométhium (Pm), hafnium (Hf) et rhénium (Re). Depuis lors, les émissions X sont utilisées en analyse chimique pour caractériser les éléments. Elles servent également à la mise en évidence d’éléments radioactifs formés au cours de réactions nucléaires et dans le diagnostic des plasmas de laboratoire et des plasmas astrophysiques.

La spectroscopie X a très largement contribué à la détermination de nombreux paramètres atomiques tels que l’énergie des niveaux, leur durée de vie, les probabilités des transitions radiatives et non radiatives... Quelques données caractéristiques du noyau ont aussi été obtenues par cette méthode.

Un domaine important de la spectroscopie X concerne l’étude des transitions d’absorption et des émissions qui mettent en jeu des niveaux électroniques externes. Ces transitions se modifient en fonction de l’environnement et de l’état de liaison de l’élément dans le matériau étudié; elles permettent d’obtenir la distribution des états de valence et de conductibilité dans ce matériau.

Après une brève description des spectres d’absorption et d’émission X d’atomes, quelques applications relevant des domaines cités seront présentées à titre d’exemple.

1. Photoabsorption

Photo-ionisation

Au cours de l’interaction d’un photon d’énergie h 益 et d’un électron atomique appartenant à une sous-couche X complète, l’électron peut être expulsé hors de l’atome si h 益 est supérieure à l’énergie de liaison de la sous-couche X (cf. rayons X). C’est le processus de photo-ionisation . L’électron éjecté est appelé un photoélectron. Au cours de ce processus, l’atome passe de l’état fondamental (état initial) à l’état mono-ionisé en sous-couche X (état final). La différence d’énergie EX entre ces deux états est appelée énergie du niveau X. C’est l’énergie nécessaire pour créer une lacune dans la sous-couche X en présence de tous les autres électrons de l’atome.

Au seuil d’ionisation X, c’est-à-dire lorsque l’énergie h 益 des photons incidents est égale à E X, on observe dans le spectre d’absorption une discontinuité dont la position énergétique correspond à E X et permet sa mesure. C. G. Barkla fut le premier à mettre en évidence la présence de discontinuités d’absorption pour certaines énergies caractéristiques de l’élément absorbant. La discontinuité K correspond à l’ionisation de la couche n = 1 (1 s ). Il existe en fait trois discontinuités d’absorption L, notées LI, LII, LIII, qui correspondent à l’ionisation des sous-couches caractérisées par n = 2, l = 0 et 1, et j = l 梁 1/2, soit 2 s1/2, 2 p1/2 et 2 p3/2. Il y a de même cinq discontinuités M, notées MI, MII, MIII, MIV et MV, qui correspondent à l’ionisation des sous-couches 3 s1/2, 3 p1/2, 3 p3/2, 3 d3/2 et 3 d5/2. Les discontinuités K, L, M, N... d’un élément Z sont situées dans des domaines d’énergie bien séparés.

Les énergies du niveau K ont été déterminées par spectroscopie d’absorption pour tous les atomes de Li à U; celles des niveaux L de Ne à Pu; celles des niveaux M pour les éléments de transition de la première série et les terres rares. Conformément à la loi de Moseley, ‘E X varie linéairement avec Z . Il est nécessaire de préciser l’état physico-chimique de l’échantillon car les énergies des discontinuités d’absorption varient avec l’environnement et la charge de l’élément considéré. Cette variation peut atteindre plusieurs électronvolts. À partir d’un spectre d’absorption X, il est donc possible d’identifier à la fois le numéro atomique de l’élément et son état de charge.

Les discontinuités X ne sont pas abruptes: pour un atome libre, la discontinuité est le produit de convolution d’une courbe «saut» par la distribution énergétique du niveau X qui, d’après la théorie quantique, est lorentzienne; c’est donc une courbe en arctangente dont la largeur mesurée entre le quart et les trois quarts de sa hauteur totale est égale à la largeur X du niveau X. Cette largeur énergétique est liée à la vie moyenne X par la relation d’incertitude X X = . La vie moyenne d’un état comportant une lacune dans une sous-couche normalement remplie est d’autant plus courte que la sous-couche est plus profonde, donc plus fortement liée. Ainsi, pour le niveau K, X varie de quelque 10 size=114 seconde pour Li à 10 size=117 seconde pour U. Les largeurs des niveaux profonds sont beaucoup plus grandes que celles des niveaux optiques; cet élargissement limite la résolution spectrale dans le domaine des rayons X durs.

Photoexcitation

Des raies d’excitation analogues aux raies d’absorption optiques sont présentes à des énergies immédiatement inférieures à celles de chaque discontinuité X. Elles correspondent au passage de l’atome de l’état fondamental vers un état excité dans lequel un électron de la sous-couche X (nl ) est «promu» dans une sous-couche initialement vide ou partiellement vide (n l ). C’est le processus de photoexcitation .

D’après le principe de réciprocité de W. Pauli, une lacune dans une couche initialement complète est équivalente à un électron sur cette même couche. On assimile donc la lacune à un électron nl . Les termes spectraux des différents états se déterminent alors comme en spectroscopie optique. Dans le cas simple d’un atome à sous-couches complètes, le spectre est déterminé par la structure en multiplet de l’état excité (nl ) (n l ). Les transitions entre le terme fondamental et les différents termes formant ce multiplet satisfont aux règles de sélection dipolaires électriques: L = 梁 1, S = 0, J = 0 ou 梁 1 à l’exclusion de J = 0 vers J = 0. À titre d’exemple, dans la photoabsorption 1 s (l = 0) de l’argon (fig. 1), on observe une série de Rydberg qui correspond aux transitions 1 sn p (n = 4, 5, 6) et qui converge vers la limite d’ionisation. Si l’interaction spin-orbite entre les électrons de la sous-couche nl est plus importante que les interactions entre la lacune nl et l’électron excité (cas des niveaux profonds), les transitions ne peuvent plus être décrites en couplage L-S et seule la règle de sélection J = 0, 梁 1 est stricte. On doit utiliser soit le couplage intermédiaire, soit le couplage j-j (cf. SPECTROSCOPIE – Spectroscopie atomique). Dans le cas général d’un atome possédant une sous-couche incomplète, la complexité du spectre augmente et dépend du nombre des électrons de valence. Le problème est équivalent à celui des spectres optiques d’atomes à plusieurs électrons.

L’écart entre les différents états X excités est faible par rapport à l’énergie de chaque état. Pour les niveaux profonds des atomes lourds, cet écart devient inférieur à la largeur du niveau. Les raies d’excitation X sont donc difficiles à résoudre, sauf dans le domaine des rayons X mous, où le pouvoir de résolution en énergie augmente et où les largeurs des niveaux sont faibles.

Lorsque les premières raies d’excitation sont résolues, il est possible de mesurer leur énergie, leur largeur à mi-hauteur ainsi que leur surface, et donc d’obtenir l’énergie de l’état excité correspondant, sa durée de vie et la force d’oscillateur de la transition d’excitation du fondamental vers cet état (cf. SPECTROSCOPIE – Spectroscopie atomique).

2. Émissions caractéristiques

Les émissions X sont de trois sortes: les raies, dites raies de diagramme, qui sont les plus intenses, les raies de résonance, qui sont analogues aux raies de résonance de l’optique, et les raies satellites. Ces raies diffèrent entre elles par la configuration de l’état initial. Rappelons que cet état est produit au cours d’une interaction inélastique entre un électron de l’atome et une particule incidente ionisante (photon, électron ou ion), d’énergie supérieure ou égale à l’énergie de l’état initial.

Raies de diagramme

À l’état initial, l’atome est ionisé dans une sous-couche profonde X. Le système est instable et tend à se réorganiser vers un état d’énergie plus basse, un électron d’une couche plus extérieure venant remplir la lacune X. À l’état final, l’atome comporte une lacune X , moins fortement liée que la lacune X. La différence d’énergie entre les deux niveaux, X et X , est émise sous forme d’un quantum de rayonnement dont l’énergie est caractéristique de l’atome considéré. On observe des séries de raies, la série K à la suite d’une ionisation en couche K (l s), la série LI à la suite d’une ionisation en sous-couche LI (2 s), etc. À l’aide de l’énergie d’un niveau, déterminé à partir d’un spectre d’absorption, et avec les énergies des raies X des différentes séries, il est possible d’obtenir les énergies de tous les niveaux de l’atome. Des tables donnant les énergies des niveaux X des éléments de Z = 3 à 92 ont été établies.

Les atomes à sous-couches complètes ont un moment cinétique total nul à l’état fondamental. À l’état initial de la transition, ils comportent une lacune X (nlj ) et leur moment cinétique total est égal à celui de l’électron manquant. Il en est de même pour l’état final. Leurs spectres X sont ainsi assimilables à des spectres d’atomes à un électron et, de ce fait, présentent une grande simplicité. Cette simplicité se retrouve dans le cas d’atomes à couche extérieure ouverte pour les transitions entre sous-couches appartenant à des couches normalement complètes. L’aspect général des séries K, LI, LII... se conserve donc d’un élément à l’autre à travers tout le système périodique.

Les émissions radiatives sont des transitions dipolaires électriques; elles sont régies par les règles de sélection de l’optique mentionnées dans le paragraphe précédent (fig. 2). Quelques raies faibles quadripolaires électriques sont observables pour les éléments lourds: pour ces transitions, L = 梁 2 et J = 0 ou 梁 2.

La distribution d’intensité dans une raie d’émission X 漣 X est le produit de convolution des distributions énergétiques de chaque niveau X et X . C’est une courbe de Lorentz dont la largeur à mi-hauteur est égale à la somme des largeurs de chaque niveau. Si l’on connaît la largeur d’un niveau X, par exemple par une mesure d’absorption, il est possible, à l’aide de la mesure des largeurs des émissions X, de déterminer les largeurs, donc les durées de vie, de tous les niveaux de l’atome.

Lorsque le niveau X appartient à la couche la plus extérieure de l’atome et que celle-ci est incomplète, les émissions X présentent des particularités. Il existe deux cas distincts:

– La sous-couche X est normalement remplie mais recouvre assez fortement une sous-couche incomplète. L’interaction entre la lacune X et les électrons non appariés de cette sous-couche introduit une démultiplication de l’état final de la transition; celle-ci présente une structure en multiplet. Si les composantes du multiplet ne sont pas résolues, on observe une raie élargie et le plus souvent asymétrique.

– La sous-couche X est une sous-couche de valence. La démultiplication de l’émission X 漣 X dépend de la configuration électronique externe.

Raies de résonance

À l’état initial de ces transitions, l’atome est dans un état excité comportant un trou dans un niveau de cœur nl et un électron dans un niveau discret n (l + l) normalement vide. À l’état final, l’atome est dans son état fondamental. Ces raies sont donc émises lors du retour de l’électron excité n (l + 1) vers le trou nl . Elles sont en coïncidence avec les raies de photoexcitation correspondantes et ne sont observables que si celles-ci sont suffisamment fortes; le cas le plus favorable correspond à n = n + 1.

L’état initial de ces raies est appelé état X résonnant . Contrairement aux états de résonance optique, les états d’excitation X résonnants ont une énergie très supérieure au premier potentiel d’ionisation de l’atome. Ils sont donc mélangés à différents continuums d’ionisation et peuvent interagir avec eux. Dans le domaine X, cette interaction est faible vis-à-vis de l’interaction entre l’électron excité et le trou; elle est insuffisante pour modifier la forme des raies d’absorption et des émissions résonnantes.

Raies satellites

L’état initial des raies satellites les plus intenses comporte deux (ou plusieurs) lacunes, dont l’une au moins dans un niveau de cœur. Des transitions d’émission, analogues aux émissions de diagramme, prennent place dans l’élément multiplement ionisé; leur énergie est peu supérieure à celle des raies de diagramme. Chaque raie X intense est ainsi accompagnée vers les grandes énergies de plusieurs raies satellites. Si ces raies sont très proches de la raie principale, elles ne sont pas résolues et introduisent une asymétrie et un élargissement des raies X.

D’autres processus donnent naissance à des raies satellites, mais leur probabilité est très faible, et ces raies influent peu sur les spectres. Il en est de même des raies de diffusion X (Rayleigh, Raman et Compton) dont l’intensité est très inférieure à celle des raies caractéristiques dipolaires électriques.

3. Exemples d’études

Probabilité d’ionisation d’un niveau X

La probabilité d’ionisation P X d’un niveau X est égale au nombre d’atomes ionisés en couche X par unité de volume du matériau et par particule incidente ionisante; elle dépend de la section efficace d’interaction de la particule incidente avec les électrons du niveau X, et diffère selon le type de particule et son énergie.

Dans le cas de l’ionisation par photons, la section efficace de photo-ionisation est constante dans toute l’épaisseur de la cible. Il en est de même de P X. L’épaisseur qui contribue à l’émission est définie par la réabsorption des rayonnements incidents et émis.

Dans le cas de l’ionisation par particules chargées, la section efficace dépend du ralentissement de la particule dans la cible, et la probabilité P X varie le long de l’épaisseur. L’émission X est produite dans une «épaisseur effective», égale au parcours de la particule dans la cible, depuis son énergie initiale E 0 jusqu’à l’énergie d’ionisation E X. Cette épaisseur est fonction de E 0 et du matériau.

Par ailleurs, en mesurant la variation de l’intensité X émise à une longueur d’onde caractéristique fixe, en fonction de l’énergie des particules chargées incidentes (courbes isochromates), on peut déterminer l’énergie nécessaire pour former l’état initial de la transition considérée et en déduire si cet état est mono-ou pluri-excité ou ionisé.

Probabilité de transition

On a montré que, pour les raies dipolaires électriques, W croît approximativement suivant une loi en Z 4. La valeur absolue de W ne peut être déterminée expérimentalement que si l’on connaît le nombre d’atomes émetteurs N (cf. Analyse quantitative ). Par contre, les probabilités relatives des transitions qui forment une série X, c’est-à-dire des transitions qui ont lieu à partir d’un même état initial, peuvent être définies directement à partir de l’intensité des raies d’émission.

Lorsque les états finals ne diffèrent que par le spin, le rapport des probabilités de transition est égal au rapport des degrés de dégénérescence de ces états. Ainsi, l’intensité des raies K 見1 (LIII-K) et K 見2 (LII-K), qui forment le doublet de spin K 見, est dans le rapport des degrés de dégénérescence des niveaux LIII et LII, soit 2.

À chaque processus de recombinaison radiatif correspond un processus de recombinaison non radiatif appelé effet Auger : au cours de ce processus, la différence d’énergie E XE X sert à ioniser un électron d’une sous-couche Y. Cet électron quitte l’atome avec une énergie cinétique E c de l’ordre de E XE XE Y; en fait, la présence de la lacune X , lors de l’ionisation de la sous-couche Y, a pour effet d’augmenter E Y, donc de diminuer E c. L’état final d’un processus Auger X 漣 X Y est un état doublement ionisé qui peut se réorganiser soit avec émission de raies X satellites, soit au cours d’autres processus Auger.

Les émissions X et les transitions Auger sont des processus compétitifs puisqu’ils se produisent les uns et les autres à la suite de la formation d’une lacune X. Par définition, le rendement de fluorescence d’un niveau X, noté X, est égal à la somme des probabilités de toutes les transitions radiatives vers ce niveau divisé par la somme des probabilités de transitions radiatives et non radiatives vers ce même niveau. Les émissions d’une série X sont d’autant plus intenses que X est plus grand. Le rendement X augmente avec l’énergie du niveau: il est inférieur à 0,01 pour tous les niveaux des atomes légers; pour le niveau K, il atteint 0,5 à partir de Z 礪 size=1 30.

Diagnostic des plasmas

On utilise le fait que l’énergie d’une raie X caractéristique dépend du nombre d’électrons de l’émetteur, donc de sa charge. À partir de l’observation des émissions X, il est ainsi possible d’identifier les ions de charges différentes présents dans le plasma et de déterminer leur abondance. L’état initial de chaque émission est produit directement au sein du plasma, par choc collisionnel avec les électrons du milieu ou par photoabsorption du rayonnement émis par le plasma. De la mesure des rapports d’intensité d’une même raie émise par des ions de charges différentes et de deux raies différentes appartenant à un même ion, on peut déduire les caractéristiques du plasma, température et densité électroniques.

Effets nucléaires

Des effets dus à la taille du noyau ont été observés dans les spectres X à très haute résolution. Ces effets sont d’autant plus importants que la probabilité de présence de l’électron est plus grande près du noyau; ils sont donc plus prononcés pour les niveaux s que pour les niveaux p. Ils augmentent avec Z , puisque, alors, le rayon du noyau augmente, tandis que le rayon moyen des orbites électroniques diminue. Ainsi, un déplacement isotopique de 漣 1,8 eV a été observé pour la raie U K 見1 entre 238U et 233U.

L’apport le plus marquant de la spectroscopie X en physique nucléaire est l’identification d’espèces à très courte durée de vie formées au cours d’interactions collisionnelles atomes-particules. Citons, à titre d’exemple, l’observation d’atomes muoniques au cours de l’irradiation d’une cible par des muons chargés négativement. Ces atomes sont formés par capture coulombienne de la particule négative par le noyau positif. Le muon effectue un mouvement orbital autour du noyau et occupe l’un des états stationnaires possibles. S’il est capturé dans un état excité, il peut tomber sur son niveau K en émettant un rayonnement X caractéristique dont l’observation a permis de montrer l’existence des atomes muoniques. Comme la masse du muon est environ deux cents fois celle de l’électron, les orbites muoniques sont approximativement deux cents fois plus petites que les orbites électroniques. La probabilité de présence du muon est donc relativement grande dans le volume du noyau, et cela est particulièrement marqué pour l’orbite K. Le fort recouvrement entre la fonction d’onde du muon et le volume nucléaire entraîne une modification importante de l’énergie du rayonnement X émis, par rapport à la valeur calculée dans l’hypothèse d’un noyau ponctuel. À partir de la mesure de l’énergie des transitions X, il a donc été possible d’obtenir des informations sur la distribution des charges nucléaires.

Analyse quantitative

Le nombre de photons 類 émis dans une raie chimique, par seconde, par unité d’angle solide et par unité de volume du matériau, est:

N est le nombre d’«atomes émetteurs», c’est-à-dire d’atomes ayant la configuration de l’état initial de la transition, présents à chaque instant par unité de volume (ce nombre dépend de la probabilité de formation de l’état initial); W est la probabilité de transition par unité de temps et d’angle solide; elle est proportionnelle à la force d’oscillateur; e size=1 size=1猪福x détermine la réabsorption du rayonnement émis par le matériau de masse spécifique et de coefficient massique d’absorption à la longueur d’onde considérée.

Pour effectuer l’analyse chimique d’un échantillon, on calibre l’intensité des raies d’émission à l’aide d’échantillons standards comportant un nombre d’atomes connu. Lorsque l’état initial de la transition est créé sous irradiation par un faisceau X (analyse par fluorescence), l’épaisseur analysée dépend du domaine spectral; elle est de quelques micromètres au voisinage de 0,1 nm. La sensibilité atteint 10–6. Lorsque l’état initial est créé par impact électronique (sonde de Castaing), l’épaisseur analysée dépend de la pénétration des électrons, donc de leur énergie incidente E 0. Elle varie de quelques dixièmes de nanomètres à quelques micromètres lorsque E 0 varie de E X à quelques dizaines de kiloélectronvolts. Il est alors possible d’effectuer des profils de concentration en profondeur avec une résolution de l’ordre de 1 nanomètre.

L’analyse par émission X est une méthode non destructive très utilisée en métallurgie et en géochimie.

Densité des états de valence et de conductibilité des solides

Les transitions X qui mettent en jeu les états de valence et de conductibilité d’un élément à l’état solide diffèrent de celles qu’on observe pour l’élément à l’état de gaz ou de vapeur. Ainsi, les raies de photoexcitation et les émissions résonnantes n’apparaissent que très rarement dans les spectres X de la matière condensée, puisqu’elles ne sont observables que si des états inoccupés discrets sont présents.

Dans un solide, les transitions d’absorption prennent place entre un niveau de cœur nl et les états étendus qui forment la bande de conductibilité. Si la densité des états vides est quasi uniforme, le spectre d’absorption présente un saut en arctangente dont le point d’inflexion donne la position du bas de la bande de conductibilité (du niveau de Fermi dans le cas d’un métal) relativement au niveau nl . Les fluctuations de la courbe d’absorption, situées au-delà du saut, jusqu’à environ 20 à 30 eV de celui-ci, traduisent les fluctuations des densités d’états vides l 梁 l et permettent leur détermination.

Quant aux émissions qui prennent place entre la bande de valence et un niveau nl , elles correspondent au produit de convolution de la distribution lorentzienne de ce niveau par les densités partielles des états de valence, de symétrie l 梁 l, localisées autour de l’élément émetteur.

La spectroscopie d’émission et d’absorption X permet d’obtenir des informations directes sur les densités d’états de valence et de conductibilité d’un matériau quelconque. Dès 1934, l’étude des émissions X a permis à H. Jones, N. F. Mott et H. W. B. Skinner de montrer que les largeurs des bandes de valence des métaux simples étaient qualitativement en accord avec les valeurs calculées dans le modèle du gaz d’électrons libres de Sommerfeld. Depuis lors, de nombreuses expériences ont été effectuées par cette méthode, sur des matériaux très divers, en vue, entre autres, d’étudier la modification des densités d’états des éléments en fonction de leur état de liaison, de leur degré de coordination, de l’état physico-chimique de l’échantillon, qu’il soit cristallisé ou amorphe, liquide, formé de petits agrégats... Ces études se font préférentiellement dans le domaine des rayons X mous, car la résolution y est meilleure qu’aux courtes longueurs d’onde, ou dans celui des rayons X ultramous, mais alors les interactions entre la bande de valence et la lacune nl ne sont pas toujours négligeables et peuvent perturber le spectre.

Enfin, il faut souligner que, lors d’une modification d’environnement de l’élément émetteur, l’ensemble de la configuration électronique se modifie, y compris les niveaux de cœur. Il est donc possible de mettre en évidence une modification de l’état de liaison d’un élément à partir du déplacement des émissions X entre niveaux profonds.

4. Aspect instrumental

L’instrumentation destinée à l’analyse des rayons X s’est considérablement diversifiée depuis l’apparition de sources non conventionnelles provenant de l’utilisation du rayonnement synchrotron, de l’observation des étoiles ou encore des études sur les plasmas chauds confinés pour la production de réactions de fusion thermonucléaire. Dans les années 1990 sont apparus des lasers à rayons X qui permettent d’envisager l’extension de méthodes d’investigation optique aux longueurs d’onde du domaine des rayons X. Ce mouvement intéresse surtout la partie des énergies relativement basses du vaste domaine couvert par l’appellation de rayons X, l’énergie des photons analysés se trouvant le plus souvent comprise entre quelques dizaines et quelques milliers d’électronvolts (cf. ASTROPHYSIQUE, physique des PLASMAS).

Principaux éléments constituant un spectrographe

Dans la gamme d’énergie mentionnée ci-dessus, l’absorption des photons par l’air est forte et ne permet que des trajets très courts. Aussi la nécessité d’assurer la propagation du rayonnement sous vide jusqu’aux appareils et à l’intérieur de ceux-ci impose-t-elle de fortes contraintes. Il en est ainsi pour les longueurs d’onde supérieures à 4,4 nm environ, c’est-à-dire pour les énergies inférieures à 300 eV, qui ne tolèrent pratiquement aucune fenêtre d’épaisseur supérieure à un dixième de micromètre sur le trajet du rayonnement. Cette difficulté a des conséquences sur le choix des détecteurs et leur mise en relation avec le reste de l’appareillage. Il faut aussi mentionner le cas des expériences poursuivies sous ultravide, par exemple à 133,3 10 size=19 pascal, dans le but de supprimer des effets nuisibles de contamination de surface des échantillons étudiés, qui conduisent à des choix de matériaux et à une conception mécanique particulièrement difficile.

Les caractéristiques spatiales et temporelles des sources étudiées sont à l’origine d’une autre catégorie de contraintes. En effet, un appareil d’analyse ne peut pas être conçu de la même manière pour une source étendue et homogène, pour une source ponctuelle brillante ou pour une source dont l’intensité et les spectres varient rapidement d’un point à l’autre ou d’un instant à l’autre.

Le rayonnement synchrotron émis par les anneaux de stockage d’électrons offre l’exemple de sources brillantes, uniformes, donnant un rayonnement très collimaté et nécessitant un transport du faisceau sur plusieurs mètres. La conception optique des spectromètres doit prévoir ces conditions de travail. Certains appareils sont pourvus d’un système de miroirs utilisés sous incidence très rasante (c’est-à-dire que l’angle du faisceau par rapport au plan tangent au miroir est de 1 à 100), assurant un bon éclairage à l’entrée de l’analyseur et permettant au faisceau de suivre les déplacements de celui-ci lors du balayage du spectre (fig. 3). Des calculs optiques complexes sont souvent nécessaires pour décider de la forme de l’analyseur et des déplacements mécaniques aptes à assurer ce balayage.

Un cas différent est celui de certains plasmas de laboratoire, qui présentent de fortes inhomogénéités sur de courtes distances, parfois ne dépassant pas un micromètre. Un dispositif de résolution spatiale est alors nécessaire, et sa présence peut limiter les choix possibles pour l’analyseur. Ainsi, si les longueurs d’onde à étudier sont de quelques dixièmes de nanomètres seulement, il n’existe pratiquement pas d’autre moyen de réaliser la résolution spatiale que de collimater le faisceau par un système de fentes fines; cela oblige à choisir un analyseur de bonne luminosité au détriment, éventuellement, d’autres qualités. Il en est de même lorsque l’expérience prévoit l’étude de la variation temporelle rapide de l’émission d’une source.

On voit donc que les principaux éléments entrant dans la constitution d’un appareil de spectrographie à rayons X doivent en général être les suivants: une enceinte à vide, une optique d’entrée formée de diaphragmes ou de miroirs sous grande incidence, un ou plusieurs analyseurs spectraux et le détecteur de rayonnement; pour les longueurs d’onde inférieures à 0,2 nm, l’enceinte à vide n’est pas nécessaire.

Principes de divers montages

Il n’existe pas d’analyseurs capables de couvrir tout le domaine de longueurs d’onde appartenant aux rayons X. La diffraction par les cristaux est soumise à la condition de W. H. Bragg, qui impose à la longueur d’onde d’être inférieure à deux fois la distance séparant deux plans atomiques dans le cristal (cf. CRISTAUX – Cristallographie). Celle-ci varie de un à quelques dixièmes de nanomètres pour les cristaux usuels. Le mica permet d’atteindre 2 nanomètres environ; des cristaux artificiels, constitués à partir de molécules à longue chaîne, de stéarate de plomb par exemple, ont pu être utilisés jusqu’à une dizaine de nanomètres, mais ils se révèlent fragiles sous le rayonnement. La technique d’empilement de multicouches très fines, qui se développe rapidement, permet d’envisager l’extension de la réflexion de Bragg vers les grandes longueurs d’onde. Celles-ci, de 2 à quelques dizaines de nanomètres, sont analysées avec des réseaux optiques recevant le rayonnement sous très grande incidence, typiquement 860 par rapport à la normale. Ce sont des conditions très différentes de celles qu’on rencontre en ultraviolet, même lointain. Ces grandes incidences sont dictées par les propriétés optiques des matériaux dans ce domaine. Sous incidence normale, le coefficient de réflexion est toujours très petit, de l’ordre de 10 size=14; mais, les indices de réfraction étant inférieurs à l’unité, on montre aisément que le phénomène de réflexion totale peut se produire dans le sens vide-matériau à condition d’adopter un angle d’incidence suffisamment grand. Un réseau peut alors atteindre une efficacité de 3 à 10 p. 100 en premier ordre d’interférence. La réflexion par les miroirs multicouches permet aujourd’hui d’atteindre des coefficients de réflexion, en incidence normale, de 20 à 60 p. 100. Cette évolution est décisive pour la réalisation de cavités pour les lasers à rayons X. De plus, la combinaison de structures multicouches avec une microgravure fondée sur le principe des lentilles de Fresnel permet la conception de dispositifs d’optique des rayons X entièrement nouveaux.

On peut citer:

Cristal plan, simple ; montage le plus facile à réaliser et de luminosité moyenne; la dispersion et le pouvoir de résolution dépendent des dimensions de l’appareil et de l’étendue de la source; il est utilisable par transmission aux courtes longueurs d’onde.

Cristal plan, double ; système de haute résolution et de luminosité faible.

Cristal courbe concave ; système focalisant de grande luminosité; il est utilisable aux courtes longueurs d’onde (fig. 4 a), pour les sources ponctuelles, le balayage du spectre nécessite la rotation du cristal.

Cristal courbe convexe ; système de luminosité faible et de large domaine spectral pour tout angle d’incidence; utile dans le cas de sources ponctuelles brillantes (fig. 4 b).

Réseau sphérique, simple ; ici, la luminosité dépend du type de réseau (gravé sur verre, réplique, holographique) et de la nature de la surface (couche métallique mince déposée sous vide); ce système est d’un pouvoir de résolution généralement compris entre 500 et 10 000.

Réseau sphérique, double (avec miroir intermédiaire): ce système permet la séparation des ordres d’interférence.

Réseau plan ; il doit être associé à une optique à miroir chargée de focaliser le faisceau; la résolution dépend de ce dispositif; il est utilisé pour le balayage d’un spectre sans rotation des angles d’entrée et de sortie.

Réseau torroïdal ; ce réseau est de forte luminosité et nécessairement fabriqué par holographie.

Réseau par transmission ; ces réseaux sont obtenus par des procédés combinant l’holographie et la photogravure; la luminosité est forte; comme pour les réseaux plans, un dispositif optique additionnel est nécessaire.

Problèmes de détection

Parmi les détecteurs, les plaques ou films photographiques ne conservent l’avantage que pour atteindre le pouvoir de résolution spectrale maximal des appareils; notons que les longueurs d’onde supérieures à 4 nanomètres demandent des émulsions très spéciales, du type Kodak SC5. Les progrès récents de la micro-électronique, de la technologie des fibres de verre, joints aux connaissances sur les propriétés photoélectriques et de fluorescence des matériaux, permettent de réaliser des images électroniques directement saisies et traitées par des systèmes informatiques. Les compteurs proportionnels à gaz et leurs dérivés, les chambres à multifils (cf. détecteurs de PARTICULES – Détecteurs électroniques) permettent des mesures précises d’intensité du rayonnement et l’analyse de variations temporelles supérieures à quelques dizaines de microsecondes. Les photomultiplicateurs ont un rendement élevé, et leur rapidité rend possible l’analyse temporelle jusqu’à une nanoseconde (10 size=19 s). Des caméras très rapides, combinant l’effet photoélectrique sur une cathode avec un balayage du faisceau d’électrons par une impulsion de haute tension, ont permis d’atteindre une résolution temporelle de quelques picosecondes (10 size=112 s).

Encyclopédie Universelle. 2012.

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